Alors que Turandot se faufile dans les corridors et les allées de la Cité interdite, ses hommes d’armes répètent leurs techniques de combat. Soucieuse de disposer d’une armée aussi efficace que dévouée, l’impératrice a fait bâtir des salles d’entraînement et fait venir de grands maîtres de toutes parts de son empire jusqu’à la cité Interdite.
Avant son arrivée au pouvoir, il était courant que les grandes familles de l’empire disposent d’une école d’arts martiaux et des services de guerriers devenus professeurs. Le simple fait de survivre aux différentes guerres était la preuve de leurs talents. Sous la férule de ceux-ci, les élèves devenaient de redoutables combattants, totalement dévoués à leurs seigneurs et maîtres.
Certes, ils apprenaient divers techniques de combat avec des armes conventionnelles : sabre, arc et flèches, dague, hallebarde, mais aussi au bâton et à mains nues au cas où leurs armes se briseraient. Mais ceci n’était qu’une partie de leur instruction. Ils passaient également de longues heures à apprendre à respirer de sorte à optimiser la régénération du corps et à accroître l’énergie. Mais surtout, ils apprenaient l’art de suspendre leurs pensées.
D’une part, lors des combats, des pensées parasites détournant un tant soit peu le guerrier de sa lutte pouvaient causer sa perte. Le cas typique étant l’attention restée fixée sur un impact au lieu de poursuivre le combat. Le bref temps de latence ainsi occasionnée donnait l’opportunité à l’adversaire de porter un coup fatal.
D’autre part, le dévouement du guerrier à ses maître ne souffrait aucune défaillance, pas même la peur de la mort. Ainsi le voulait le code d’honneur appliqué par tout homme de valeur. Devenir guerrier impliquait un lien indissoluble avec son seigneur. Ce lien se traduisait par un sens du devoir et de l’obéissance absolu. La crainte de la mort pouvant mettre à mal cet idéal, on enseignait aux combattants l’art de faire le vide dans l’esprit pour y palier. Cela consistait en une répétition de gestes (par les entraînements ou par la pratique d’arts comme la calligraphie, la cérémonie du thé ou l’arrangement floral) ou de séances de méditation dans le but de se libérer de tout attachement aux biens et aux besoins terrestres. L’état de « non-esprit » ainsi obtenu permettait d’acquérir les automatismes et la fluidité nécessaires au combat, de faire preuve d’une détermination et d’un dévouement sans faille, ainsi que d’avoir une maîtrise de soi permanente y compris dans les situations les plus difficiles. Cette mise en condition du corps et de l’esprit résultait d’un entraînement répétitif, rigoureux, voire extrêmement sévère. Tous les postulant ne le supportaient pas. Seuls les élèves les plus déterminés persistaient dans leur apprentissage. Ainsi, les armés des grandes familles étaient constituées de guerriers d’excellence.
Cette qualité des forces armées aux services des nobles de l’empire fit ombrage à Turandot. Celle-ci craignit pour sa sécurité, ainsi que pour la sûreté et l’intégrité de son empire. En aucun cas, elle ne souhaitait revivre l’époque des perpétuelles guerres entre clans, lesquelles ravageaient les terres, tuaient massivement et mettaient l’autorité impériale en danger. Aussi convoqua-t-elle tous les grands maîtres à la Cité interdite. Elle leur imposa de quitter leurs seigneurs et de se mettre au service de l’armée impériale, sous peine de voir leurs familles emprisonnées et torturées. C’est ainsi que d’imminents professeurs instruisirent les guerriers de Turandot, au détriment des nobles de province. L’impératrice assurait ainsi sa sécurité et par la même occasion disposait ainsi d’une armée de haute qualité afin de conquérir enfin le royaume des sommets près des dieux et maintenir la paix et l’ordre au sein de l’empire.
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