36 Au cimetière

Le cimetière où pénètre Calaf est à l’image du foisonnement de la capitale. Il regroupe les tombes les plus hétéroclites qui soient, à l’image des différentes croyances des défunts : tombes en hémicycles, stupas, simples stèles, et même croissants de lune, étoiles de David et croix pour les marchands étrangers. On trouve aussi un champ de crémation pour ceux qui croient en la réincarnation.

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Illustration : Diane-Sophie Deval (http://dsart.free.fr/index.html)

 

La fumée qui se dégage des bûchers et des bâtons d’encens donne une atmosphère fantomatique. De l’enceinte de la Cité interdite ou de l’intérieur du cimetière, Calaf se demande quel est l’endroit le plus périlleux. En effet, le cimetière est peuplé d’êtres inquiétants. On y croise des dévots qui méditent, assis sur le torse de cadavres. Il s’agit pour eux de combattre l’effroi causé par la mort, ou bien de communiquer avec les esprits en prenant possession de l’esprit du mort.

Mais surtout, le cimetière est le lieu où l’on risque le plus de rencontrer des revenants et des démons. De nombreux habitants de la capitale croient que les âmes des personnes mortes prématurément reviennent hanter le monde des vivants, sous forme d’esprits malfaisants, errant de par le monde, sans au-delà où se rendre. Les spectres apparaissent également lorsque les rites funéraires sont mal exécutés. Les âmes des prétendants font particulièrement peur. Comme ils ont tous été tués dans la force de l’âge, et qu’ils n’ont pas épuisé leur lot de vie, les vivants redoutent leur jalousie et leur vengeance. Ils ne sont pas les seuls à effrayer la population. Les âmes errantes des victimes de meurtres, des accidentés et des femmes mortes en couche sont également réputées tourmenter ceux qui restent après eux.

 

Aux côtés des spectres errants, on trouve souvent des démons. Ils incarnent les péchés des vivants : violence, luxure, gloutonnerie,… Ils vivent presque nus et sont reconnaissables à leurs cornes et à leurs couleurs éclatantes. Dotés de crocs acérés, ils aiment à dévorer leurs victimes. Comme trophées, ils gardent la peau de leurs proies dont ils se drapent et se parent de leurs os qu’ils ont sculptés en ornements. Lorsqu’ils sont présents dans les enfers, ce sont eux qui torturent les défunts coupables de crimes durant leur vie.

 

Dans cette atmosphère menaçante, Calaf sent son esprit se troubler. Rongé par la terreur et la fatigue, il s’assit sous un figuier pour faire le vide dans son esprit et y voir plus clair. Comme il l’a appris au monastère, la vacuité seule conduit à la vérité et la vérité pure chasse les peurs. Seulement, des êtres étranges ont décidé de troubler sa paix…

Sources d’inspiration

  • LENOIR Frédéric (sous la direction de), La mort et l’immortalité : encyclopédie des savoirs et des croyances, Paris, Bayard, 2004.
  • MIDAL Fabrice, Mythes et dieux tibétains, une entrée dans le monde sacré, Paris, Edition du Seuil, 2000.
  • GODELIER Maurice (sous la direction de), La mort et ses au-delà, Paris, CNRS Editions, 2014.
  • CLÉMENT Catherine, Promenade avec les dieux de l’Inde, Paris, Points, 2007.
  • FAURE Bernard, La mort dans les religions d’Asie, un exposé pour comprendre, un essai pour réfléchir, Paris, Flammarion, 1994.

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